Depuis quelques années, la science s’est intéressée aux effets de la méditation sur le cerveau chez les méditants aguerris et les nouveaux initiés. Si nous sommes encore au début des recherches, les études pointent vers de nombreux bienfaits de la pratique méditative.

L’entraînement à la présence attentive, ou pleine-conscience, nous permet d’actualiser notre potentiel et de faire ressortir le meilleur de nous-mêmes. En exerçant l’esprit par la méditation, nous pouvons parfaire notre sagesse et nos qualités fondamentales telles que la paix et la liberté intérieures, la clarté, la compassion, et la pleine-conscience. Plus nous développons ces qualités intrinsèques, plus nous avons d’espace intérieur pour faire face aux aléas de la vie et s’ouvrir aux autres.

Matthieu Ricard

La plasticité cérébrale

La neuroplasticité, ou plasticité cérébrale, désigne la faculté du cerveau à s’adapter, y compris dans sa structure, par l’expérience vécue. Nos neurones peuvent ainsi se régénérer et créer de nouvelles connexions pour s’adapter ou récupérer après un traumatisme ou un apprentissage. Lorsque l’on s’initie à une nouvelle notion ou un nouveau geste, des connexions neuronales se créent. À force de répétitions, la communication entre les neurones se renforce, devenant plus rapide et plus efficace. Ainsi donc, la pratique régulière d’une activité entraîne la modification et le renforcement de la zone du cerveau sollicitée. Cette plasticité cérébrale n’est pas propre aux enfants : si elle ralentit légèrement en vieillissant, elle reste tout de même bien présente à l’âge adulte.

La méditation stimule des zones du cerveau régulièrement. Elles sont donc forcées de s’adapter et de se renforcer. « La pratique régulière de la méditation a ainsi un effet physiologique sur le cerveau : cela se traduit par l’activation de certaines zones qui commandent notre attention, nos émotions, notre présence au monde et aux autres. », explique Antoine Lutz, directeur de recherche à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), à Lyon.

L’état des recherches scientifiques 

Sara Lazar a observé l’évolution des cerveaux de non-méditants avant et après avoir suivi un cycle de MBSR de huit semaines, à raison d’une séance quotidienne d’une demi-heure. Son étude a montré :

  • Un épaississement de l’hippocampe gauche qui conduit à une augmentation de la densité de matière grise dans le cortex. Cette dernière est nécessaire au bon fonctionnement des facultés cognitives, de la mémoire et des régulateurs émotionnels. Une étude précédente menée sur des méditants aguerris, d’une cinquantaine d’années, avait montré que leur cortex frontal (qui rétrécit avec l’âge) était aussi épais que celui de personnes de 25 ans. 
  • Un épaississement du cortex cingulaire postérieur : plus il est épais, moins l’esprit divague et plus notre perception du monde est réaliste. C’est notamment ce qui nous permet d’être présent au monde sur le moment, sans jugement ni anticipation. 
  • Un renforcement du pont, où beaucoup de régulateurs permettant le contrôle du rythme respiratoire, du sommeil, de l’activité cardiaque et du taux de glucose dans le sang sont produits. 
  • Une activation accrue du carrefour temporo-pariétal qui relie les lobes temporal et pariétal. Ces deux zones sont impliquées dans l’acquisition, le traitement et la réponse aux informations sensorielles et cognitives (attention, langage, cinq sens…).
  • Une réduction de l’amygdale qui intervient dans la reconnaissance et l’apprentissage émotionnels et dans les réponses comportementales, notamment à la peur et l’anxiété.
  • Une meilleure régulation de la tension et des émotions.

Ces résultats soutiennent les conclusions de plusieurs études sur les bienfaits de la méditation. Concrètement, méditer régulièrement permettrait de renforcer sa concentration, d’améliorer ses capacités mémorisatrices et de réduire la perte de mémoire due à l’âge. Apprendre à contrôler et rediriger ses pensées participerait aussi à améliorer la qualité et la durée du sommeil. On compterait également parmi ses effets positifs, une réduction des effets inflammatoires et chimiques, causés par le stress et une meilleure gestion de l’anxiété. Les pratiques contemplatives servent aux patients suivis pour dépression à moins ruminer leurs pensées négatives, caractéristiques de la dépression. Grâce à une discipline mentale, une conscience de ses émotions et une connaissance de soi accrues, la méditation aiderait également à avoir une image de soi plus positive. Elles sont donc parfois utilisées pour lutter contre les addictions et les troubles dépressifs et psychologiques, comme thérapie complémentaire. 

Découvrez les effets de la méditation
avec Matthieu Ricard

Les techniques méditatives dans le traitement des troubles psychologiques

La méditation est utilisée par certains médecins dans le traitement des troubles psychologiques, et notamment dépressifs et anxieux. Une étude portant sur l’utilisation des techniques de pleine conscience dans le traitement des troubles psychiatriques a été menée auprès de 12 000 patients entre 2000 et 2016. Elle a conclu que celles-ci avaient des résultats équivalents aux traitements psychiatriques cliniques et supérieurs aux suivis médicaux sans traitement.

L’explication se trouve peut-être dans le travail mené par le docteur Steven Laureys, neurologue belge ayant étudié le cerveau de Matthieu Ricard. Il a constaté une activité cérébrale intense, quelle que soit l’activité effectuée, et en particulier dans le cortex préfrontal gauche qui participe à la réponse émotionnelle. Cette zone est connectée aux régions du cerveau responsables du contrôle de la dopamine, de la noradrénaline et de la sérotonine. Une activité intense témoigne d’une capacité très développée à ressentir des affects positifs, à l’inverse des états dépressifs.

La méditation est également utilisée pour soulager les personnes souffrant de douleurs chroniques. En effet, les personnes rompues à la méditation ressentent la douleur avec la même intensité mais l’anticipent moins, ce qui limite la souffrance. Elles ont aussi plus de facilité à la relativiser et à s’y habituer. 

Malgré ces conclusions prometteuses, il est important de garder en tête que l’utilisation de la méditation dans le domaine du soin ne remplace en rien les traitements médicaux ordinaires. Elle doit être utilisée en complément et sous le contrôle de médecins ou d’instructeurs formés. Par ailleurs, environ 8% patients ont rapporté une expérience désagréable, voire même des effets négatifs, comme l’aggravation de leur anxiété, des crises de panique ou des émotions déformées. 

Entraînez votre esprit
avec Matthieu Ricard

Méditation, bienveillance et interconnexion 

Un des autres effets de la méditation serait la capacité à s’améliorer, en tant qu’être humain. En effet, elle nous permet de nous connaître et d’identifier nos défauts et marges de progression pour atteindre un « mode d’être optimal » (Matthieu Ricard). Chacun peut alors aller trouver la pépite d’or qui se trouve plus ou moins enfouie et la polir, chaque jour. Entraîner son esprit est un moyen de parvenir à maîtriser ses émotions, comme la colère ou la tristesse, de se libérer du biais de négativité et donc, d’avoir un comportement plus calme. En parallèle, on peut se servir de la méditation pour générer des émotions positives comme la gentillesse ou la joie, ressentir de l’empathie et de la compassion pour les autres, et nourrir notre bienveillance et notre amour altruiste. Il est ensuite possible de les diffuser à l’ensemble des êtres sentients.

Nous passons beaucoup de temps à améliorer les conditions extérieures de notre vie, mais en fin de compte, c’est toujours l’esprit qui crée notre expérience du monde et la traduit en bien-être ou en souffrance. Si nous transformons notre mode de perception des choses, nous transformons notre mode de perception des choses, nous transformons la qualité de notre vie. C’est ce type de transformation qu’apporte l’entraînement de l’esprit, que l’on appelle “méditation”.

Matthieu Ricard, dans Cerveau et méditation, avec Wolf Singer

Et puisque la façon dont nous agissons est forcément influencée par notre esprit, cultiver un état d’esprit altruiste c’est adopter une attitude et des actes en congruence. On devient alors plus ouverts et plus tolérants, car capables de différencier une critique concernant notre avis d’une autre portant sur notre personne. On accueille les opinions divergentes de manière objective, sans se laisser guider uniquement par nos propres convictions ou émotions.  Ainsi, on accepte plus facilement la pluralité de points de vue. C’est ce qui permet des débats constructifs et respectueux de pensées de l’autre. De telles transformations à l’échelle individuelle contribuent à la transformation de la société, qui n’est rien d’autre que la somme de nos comportements individuels. Pratiquer, c’est donc aussi participer à construire un monde plus altruiste, à son échelle. 

La méditation n’est peut-être pas suffisante pour changer le monde mais elle est nécessaire. C’est un outil qui nous donne la capacité d’affronter le monde avec du recul, de l’humilité, du discernement.

 Christophe André
Comment la méditation peut-elle changer le monde ?
avec Christophe André, Jon Kabat-Zinn et Matthieu Ricard

La méditation chez les enfants

La méditation est aujourd’hui utilisée dans certaines classes ou par certains professionnels, de la santé notamment, auprès des enfants. Des recherches ont montré  que la méditation produisait des résultats similaires à ceux des adultes. Néanmoins, la zone du cortex préfrontal est moins développée chez les enfants que chez les adultes. Cela explique que les méthodes de distraction généralement utilisées pour soulager l’anxiété ou la détresse, et qui sollicitent cette zone du cerveau, sont moins efficaces chez les plus petits. Les méthodes méditatives sont donc à adapter à l’âge des bénéficiaires

Lire notre article sur
la méditation pour les enfants

Des résultats d’études à confirmer

Si les études sur les effets de la méditation se sont multipliées ces dernières années, celles-ci restent moins nombreuses et moins approfondies que celles sur la médecine occidentale par exemple. Sans compter que certaines d’entre elles comportent des biais, dûs à la source de leur financement. 

Par ailleurs, de nombreuses imprécisions persistent quant à la fréquence ou la durée totale nécessaires pour commencer à voir des résultats ou déterminer la persistance de ces effets sur le long-terme. Les recherches n’ont pas non plus exploré l’influence des caractéristiques propres à chaque individu ou de leur mode de vie (nombre d’heures de sommeil, activités annexes, etc) sur les résultats observés.  

Si la science doit encore confirmer certaines observations, il est certain que méditer régulièrement comporte de nombreux bienfaits. C’est avant tout un cheminement personnel, qui doit vous ressembler et vous seoir, vous permettre de vous sentir bien et de vous améliorer

Retrouvez toutes nos ressources
pour cultiver votre état d’esprit altruiste 

Débuter la méditation

Alors comment faire pour bénéficier des effets de la méditation ? Les spécialistes recommandent de pratiquer ne serait-ce que quinze à trente minutes par jour, régulièrement, pour améliorer sa concentration et sa conscience. Certaines études suggèrent que la pratique contemplative pourrait produire des résultats positifs dès les premières minutes chez une personne non-initiée.

Mais attention à ne pas l’idéaliser non plus, nuance Jon Kabat-Zinn, la méditation ne changera peut-être pas notre vie du jour au lendemain et méditer peut s’avérer dur au début. De la même manière que l’on ne devient pas ceinture noire de karaté ou que l’on n’acquiert pas le grand écart en deux mois, on ne devient pas expert en méditation immédiatement. Les séances de méditation de deux heures ne seront pas pour maintenant et nous n’aurons pas le cerveau de personnes qui pratiquent la méditation régulièrement depuis des années au bout d’une séance.

Par ailleurs, rappelle celui qui a conceptualisé le programme MBSR : 

La vie elle-même est la méditation véritable et pas seulement les moments que nous passons assis à méditer.

Jonn Kabat-Zinn

Pour commencer, les exercices de méditation guidée peuvent être plus accessibles. En essayant les différentes sortes de méditations laïques qui existent (balayage corporel, observation de la respiration, pleine conscience…) chaque personne peut trouver celle qui lui convient et progresser à son rythme.

Il peut être normal de trouver ça difficile, ennuyant, et de ne pas arriver à trouver le temps pour méditer. L’important est de persévérer : la régularité prime sur la quantité pour constater des progrès. Parfois nous aurons besoin de rigueur et de discipline, parfois nous aurons plutôt besoin de douceur et de détente. Souvenons-nous qu’il n’y a rien à réussir ou rater lorsque l’on médite, offrons nous des moments de présence, avec ce qui est là, maintenant.

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Sources