Depuis de nombreuses années, Karuna-Shechen développe le programme Un peu d’argent, de grands changements dans le nord de l’Inde, dans le Bihar et le Jharkhand. Son objectif : améliorer la vie quotidienne des habitants, en leur proposant des solutions uniques et durables qui leur donneront les capacités de subvenir eux-mêmes à leurs besoins.
Cette approche permet de renforcer la résilience des populations et de travailler main dans la main dans la mise en place de solutions adaptées à leur quotidien. Nous fournissons aux villageois les outils et les connaissances dont ils ont besoin pour gérer durablement les ressources locales et contribuer concrètement au bien-être de leur communauté.
Du social mapping à la construction en passant par la formation d’un comité de suivi et l’ouverture d’un compte pour la communauté, nous accompagnons les villageois dans la mise en œuvre de leurs projets. Cette année, la majorité de ces projets s’oriente autour d’une problématique de taille : l’eau.
Surmonter les enjeux de l’accès et de la gestion de l’eau
Si l’eau est le facteur commun qui rassemble certains villages d’Inde dans leur besoin, multiples sont les problématiques existantes autour de ce sujet. Les habitants ne bénéficient d’aucune aide des pouvoirs publics pour les aménagements et les infrastructures : à chaque village, un nouveau défi est à relever.
L’agriculture fait partie intégrante des préoccupations liées à l’eau. D’une part, la mousson peut provoquer des inondations, abîmer les cultures et mettre en danger la population. Au fil du temps, ces pluies sont de plus en plus courtes et intenses, ne laissant pas assez de marge de manœuvre aux agriculteurs pour planifier et créer des espaces permettant d’endiguer le risque. À Pachhan, dans le district de Gaya, les villageois peinent à se rendre sur leurs terres agricoles pendant la mousson. Ils doivent se frayer un chemin dans l’eau de manière souvent dangereuse.
D’autre part, les pénuries d’eau sont de plus en plus fréquentes et craintes par les fermiers qui voient leurs terres s’assécher et ne plus produire assez de nourriture. Avec le réchauffement climatique, les conditions météorologiques des régions du nord de l’Inde deviennent de plus en plus extrêmes et provoquent un assèchement notoire des sols. Les températures dans la période de mars à juin atteignent par moments 40°C et les journées peuvent s’enchainer sans pluie. C’est le cas notamment du village de Sundarkumhari dans le Bihar dont l’agriculture est la principale activité de la communauté. Ces dernières années, la région n’a pas bénéficié de pluies suffisantes : beaucoup des habitants ont donc été contraints d’abandonner l’agriculture et d’émigrer vers les villes à la recherche d’autres moyens de subsistance. Malheureusement, la pandémie a entraîné des pertes d’emplois et a contraint les jeunes à retourner dans leur village natal. Le même problème a touché d’autres villages comme celui de Kurmawan.
Dineswar, agriculteur âgé de 65 ans, avait décidé d’abandonner les pratiques agricoles à cause de la pénurie d’eau récurrente dans son village ces dernières années.
La pandémie nous a appris que l’agriculture pouvait être le seul moyen de subsistance en temps de crise. Ainsi, afin de résoudre le problème de l’irrigation, nous, les villageois, sommes arrivés à la conclusion que nous avions besoin d’urgence d’un plan d’eau.
Les déplacements contraignants pour chercher de l’eau ou encore le rationnement pour faire la cuisine et pratiquer des gestes d’hygiène quotidiens impactent la qualité de vie des populations et sont également des difficultés à prendre en compte. De nombreux villages dans nos zones d’intervention rencontrent ces problèmes : par manque de moyens pour entreprendre des travaux durables, les habitants sont confrontés à une lutte quotidienne pour obtenir de l’eau et subvenir à leurs besoins. Le puit du village est souvent l’unique source significative d’eau pour la communauté, souvent en très mauvais état et ne fournit pas d’eau en quantité suffisante.
Agir mains dans la main avec les villageois
Les actions que nous menons visent à améliorer la qualité et les conditions de vie des populations. En permettant un meilleur accès et une meilleure gestion de l’eau dans les villages, nous leur facilitons des tâches quotidiennes, nécessaires au bon fonctionnement de la communauté : agriculture, alimentation, hygiène, etc.
Ensemble, nous avons construit des dispositifs pour faire face aux moussons responsables d’inondations. Nous avons apporté notre soutien à 350 villageois de Pachhan, dans le district de Gaya, en installant des canaux d’évacuation pour endiguer l’eau. Le ponceau rend les champs agricoles accessibles pendant la saison des pluies et permet aux tracteurs d’atteindre les fermes sans difficulté, ce qui facilite le labourage et les autres activités agricoles.
De nombreux bassins de rétention ont également été creusés dans les villages en réponse à l’inquiétude grandissante autour de la sécheresse. Ces installations assurent un meilleur accès à l’eau potable. C’est le cas notamment du bassin dans le village de Kurmawan de 625 habitants. L’étang devrait permettre à la communauté d’échapper à la pénurie d’eau à laquelle elle est confrontée pendant la majeure partie de l’année, en particulier pendant les étés arides. Il répond aux besoins domestiques individuels en eau ainsi qu’aux besoins de subsistance, notamment l’irrigation agricole et la pisciculture.
Dineswar, un villageois, témoigne : “Karuna nous a permis d’avoir un nouvel étang qui va résoudre nos problèmes d’irrigation. Maintenant, les villageois disposent de suffisamment d’eau, même en été, pour effectuer les tâches ménagères. Cela me rend très heureux !”
Shersingh est père d’une famille de 6 personnes. Pour subvenir à leurs besoins, il était travailleur journalier en ville. Aujourd’hui de retour au village de Kazibigha, il nous fait part de son vécu : “Au départ, nous étions tous inquiets mais le personnel de Karuna-Shechen était constamment là pour nous guider. Ils ont des réunions avec tout le village et j’ai pu vraiment m’investir dans la mise en œuvre du projet. J’en ai tiré une leçon précieuse : l’union fait la force. Nous, les membres de la communauté, ainsi que l’équipe Karuna-Shechen, avons travaillé ensemble pour que le projet d’étang devienne réalité.”
Son témoignage permet de rendre compte de la démarche employée lors de nos projets dans le cadre du programme Un peu d’argent, de grands changements.
Pour améliorer la gestion de l’eau de certains villages, nous avons remis en état des installations devenues vétustes. Ainsi, le village de Koikala et ses 75 habitants ont bénéficié de la réparation de leur puits. Toute la distribution d’eau potable ainsi que la culture des potagers sont à nouveau possibles.
Les déplacements, les rassemblements difficiles mais aussi la crainte des équipes face à la nouvelle vague particulièrement mortelle de la pandémie ont constitué des obstacles. Malgré les épreuves, nous sommes parvenus à nous organiser pour respecter les normes sanitaires sans pour autant abandonner l’efficience primordiale sur le terrain.
Cette année, nous avons réussi à entreprendre un important travail de développement communautaire malgré la deuxième vague plus meurtrière de Covid-19. Nous avons déjà construit quatre étangs et un puits dans le cadre du programme Un peu d’argent, de grands changements. Nous avons su nous adapter pour maintenir les efforts !”
Shamsul Akhtar, directeur des opérations Karuna-Shechen Inde