Nubri : Entre Crise Climatique et Défis Sociaux

Le changement climatique accéléré dans la région montagneuse de Nubri, au Nord du Népal, constitue un phénomène alarmant.

Les perturbations qu’il engendre, couplées à la demande accrue de bois dans la région, entraînent des catastrophes telles que des glissements de terrain et la baisse de rendement des cultures traditionnelles de pommes de terre et d’orge.

De fait, les femmes responsables de la collecte du bois, sont surchargées, tandis que beaucoup d’hommes ont quitté les villages pour aller travailler illégalement dans des pays occidentaux comme main d’œuvre bon marché.. 

Le système agropastoral (d’agriculture et d’élevage) traditionnel des villages reculés de Samagaun (3550m) et Samdo (3900m)- il faut marcher 4 à 5 jours de pour parvenir aux villages qui ne sont desservis par aucune routes- se trouve affecté par ces problématiques, menaçant la sécurité alimentaire des communautés.

Afin de faire face à ces défis, l’association H.E.L.P. (Himalayan, Environment, and Life Protection) créée par Mingyur Rinpoche, avec l’accompagnement de Karuna-Shechen, a mis en place un projet de résilience climatique visant à aider les communautés, dont de nombreuses femmes, de Samagaun et Samdo.

Karuna-Shechen et H.E.L.P ont développé une coopération étroite, facilitée par la relation privilégiée avec Margot Clavier, coordinatrice de projet, qui a contribué au succès de ce projet visant à renforcer la résilience climatique.

Paul Saucé, Responsable de soutien sur le terrain

S’unir pour la résilience

C’est en 2022 que Karuna a décidé de s’associer à H.E.L.P pour soutenir un projet de Résilience Climatique. Les deux organisations se retrouvent autour de valeurs communes : la collaboration altruiste est le fondement de nos approches holistiques.

Tout comme Karuna, H.E.L.P. travaille main dans la main avec les communautés.

Leurs besoins sont évalués et une étude de besoin est systématiquement effectuée avant chaque projet afin de trouver comment y répondre efficacement.

Ensuite, des solutions sont proposées aux villageois afin qu’ils donnent leur avis.

Il est essentiel de les écouter et de s’adapter au contexte local.

Alors, il a été décidé d’accompagner les villages de Samagaun et Samdo dans le but d’accroître leur résilience, d’atténuer les effets du changement climatique, de protéger la biodiversité et de réduire la déforestation tout en créant des opportunités de revenus locaux.

Chez H.E.L.P. , l’humain n’est pas traité comme un moyen, mais plutôt comme une fin en soi. C’est une approche également présente chez Karuna qui me parle profondément.

Margot Clavier, coordinatrice de projet H.E.L.P.


Un projet, plusieurs initiatives

La lutte contre la déforestation

Au Népal, il existe un système dans lequel la gestion des forêts est confiée aux communautés. Un groupe de reforestation communautaire a été créé à Samdo qui gère la nurserie du village. 20,000 arbres d’espèces locales y ont ainsi été plantés entre 2023 et 2024.

Des projets pilotes d’agroforesterie sont menés pour renforcer la biodiversité, en replantant des arbres dans des zones déboisées proche des champs, certains aux milieux de buissons d’épineux poussant naturellement et agissant comme des barrières naturelles contre les yaks qui évoluent en liberté dans les villages avant et après l’estive.

Pour réduire la coupe de bois de chauffe, les hôtels et guesthouses des villages, qui sont les plus grands consommateurs, sont encouragés à utiliser des chauffages à bain d’huile moins vorace en électricité que des chauffages électriques classiques.

Un projet pilote a été lancé dans lequel les guesthouses ont pu acheter des chauffages et les testeront durant la saison de trekking d’octobre 2024 afin de juger par elles-mêmes si ce système leur convient et si elles peuvent limiter, voire abandonner l’utilisation du chauffage au bois, et donc arrêter d’en couper.

La replantation d’arbres profitera à l’environnement et au village en réduisant les glissements de terrain.

Mendok Lama, membre du Comité de Reforestation

Une agriculture de pomme de terre résiliente (permaculture)

L’agriculture de pomme de terre est aujourd’hui menacée par une verrue.

Les pommes de terres, qui sont l’une des sources principales de l’alimentation des communautés, deviennent par conséquent de plus en plus petites, souvent inconsommables et leur pousse est à terme compromise si cette maladie n’est pas traitée d’ici 3-5 ans.

Il fallait agir sur l’épidémie de verrues de la pomme de terre, un virus qui provoque des excroissances sur les tubercules. Les individus enlèvent ces excroissances et les jettent dans la terre, ou les donnent aux yaks qui contaminent les champs avec leurs excréments.

Margot Clavier

Le projet de permaculture résiliente, qui se veut plus respectueux de la biodiversité et de l’humain, qui est actuellement en cours vise à limiter cette menace sur les cinq prochaines années.

De nouvelles graines sont plantées pendant deux ans, tout en cultivant parallèlement des pommes de terre résistantes à la verrue développées en laboratoire.

Au bout de la troisième année, ces cultures seront introduites dans les communautés locales afin d’évaluer leur efficacité et leur intégration dans les systèmes agricoles existants.

Résilience en action

D’autres projets sont actuellement en cours de mise en œuvre pour développer des opportunités économiques durables, promouvoir des chaînes de valeur durables et créer de nouveaux marchés pour les produits locaux.

Entre autres, des micro filières de produits issus de la biodiversité tels des herbes médicinales et de huiles essentielles de diverses plantes et arbres poussant dans la région, de l’ail sauvage, mais aussi de fromage de yak et de laine de yak sont à l’essai.

Une fois mise en place, elles auront pour but de permettre une protection des écosystèmes tout en assurant des revenus aux communautés et aux femmes, traditionnellement en charge de l’agriculture, ainsi que de préserver la culture himalayenne et les moyens d’existence traditionnels de Samagaun et de Samdo.

Ce projet partenaire est aussi un moyen pour les communautés de Samdo et Samagaun de gagner en autonomie. Dans cet esprit, une maison de communauté de femmes est notamment en construction, afin que les femmes puissent mettre en place et vivre d’activités qui leur ressemblent. 

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