Karuna-Shechen brise les tabous sur ce que les femmes rurales peuvent ou ne peuvent pas accomplir, et fait ainsi évoluer les mentalités. Comme le souligne souvent le Dalaï Lama, nous avons plus que jamais besoin d’empathie, d’altruisme et de compassion : il est donc temps d’entrer dans “l’âge de la femme”. – Matthieu Ricard

Bien que le Népal avance sur les sujets touchants à l’égalité entre les femmes et les hommes, la société reste encore très ancrée dans un système patriarcale. D’après un rapport de 2004 des Nations Unies, seul le père, ou un autre membre masculin du foyer, peut transmettre sa nationalité et il est nécessaire d’obtenir une autorisation de son époux pour qu’une femme détienne un passeport. Par ailleurs, le Népal est un des rares pays où l’espérance de vie des femmes est moins élevée que celle des hommes en raison des risques liés à l’accouchement, des mariages et grossesses précoces, du faible accès à une alimentation saine et aux soins de santé. Dans les campagnes du Népal près de 25% des femmes souffrent de prolapsus des organes pelviens (POP) entraînant de graves conséquences sur la santé des mères. Karuna Shechen, à travers ses différents programmes, tente déjà de sensibiliser les communautés aux questions de santé féminine.  Selon une étude de l’Unesco en 2018, on observe également un écart de 18,9 points entre le taux d’alphabétisation des hommes et celui des femmes. 

Chez Karuna-Shechen, nous avons la ferme conviction que les femmes sont actrices du changement et qu’elles représentent un levier puissant pour aller vers un monde plus altruiste.

Une nouvelle opportunité professionnelle 

Le programme d’énergie solaire de Karuna-Shechen combine deux objectifs : fournir de l’électricité propre aux foyers très isolés et donner la possibilité aux femmes d’être porteuses de lumière dans leurs communautés. Elles suivent ainsi un formation complète de technicienne solaire à Katmandou pour une durée de 14 jours. À leur retour, elles installent et entretiennent des systèmes solaires d’éclairage domestique dans leurs villages respectifs. En 2020, 600 foyerssont équipés de panneaux solaires et 12 femmes reçoivent une formation. 

Anju Yonjan est une femme du village de Khadadev, au Népal. Elle a choisi de participer au programme d’électrification par panneaux solaires proposé par l’association en 2017 :

Après la formation, nous avons commencé le câblage électrique des maisons, des tâches comme l’installation de nouvelles ampoules et le remplacement d’ampoules endommagées.

La détermination et les compétences acquises par ces femmes ont permis à 2 400 bénéficiaires en 2019 d’avoir de l’électricité au sein de leur foyer, et la pérennité du programme est assurée grâce à la construction de magasins dans trois villages au Népal, qui ont eux-mêmes un large rayonnement : “Mon magasin est au bord de la route et il est facile d’accès pour tous. Par conséquent, les clients viennent de villages tels que Choprang, Phanjyang, Bhirkot, Pankhar, Nigalapani et Majuwa” , témoigne Anju.

Si la société n’encourage pas les femmes à jouer un rôle actif dans leurs communautés, leur formation leur a néanmoins permis de se regrouper et de prendre conscience de leur force pour faire changer les mœurs. Grâce à ce programme elles deviennent entrepreneuses et autonomes; elles représentent un exemple à suivre pour leurs consœurs et les générations futures.

L’autonomisation des femmes au coeur du changement sociétal

Si la plupart des foyers au Népal témoignent d’une cristallisation des inégalités de genre, Anju Yonjan est l’exemple vivant qu’il existe des exceptions et donne l’espoir d’un changement des mœurs dans la société népalaise. Pour cette femme, c’est notamment grâce au soutien de son mari qu’elle a pu aller si loin : “Je n’ai fait face à aucune restriction et à aucun problème familial. Au contraire, mon mari me soutient pour aller de l’avant et participer à des projets qui peuvent faire progresser la place des femmes dans la société. (…) Certains villageois font des commentaires et des critiques sur mes différentes activités mais je suis persuadée qu’avec le temps les messes basses cesseront.” (…) Tous les gens ont besoin de clarté dans leur vie, nous n’avons jamais eu une telle opportunité dans le passé.”

C’est une grande avancée que les femmes, qui sont généralement confinées dans leur maison à faire des travaux ménagers, aient pu acquérir de telles connaissances en allant à Katmandou par leurs propres moyens. Cette formation m’a donné confiance en les capacités des femmes : nous pouvons être technicienne et entrepreneuse. 

Leur métier de technicienne et entrepreneuse leur transmet d’une part des compétences utiles dans la sphère économique mais les conduit d’autres parts à jouer un nouveau rôle, bien plus actif, dans la refonte de la société népalaise. Elles se voient confier de nouvelles responsabilités, qui s’étendent à la sphère politique : “Je suis membre du comité de gestion de l’école de Saraswati. J’ai aussi le rôle de secrétaire du groupe d’utilisateurs du projet de route et de développement dans le village.” , témoigne Anju. Elle conclut : “Néanmoins, ce que je retiens avant tout de cette formation ce sont les qualités qu’elle m’a permis d’acquérir et non pas le revenu que je gagne maintenant.” Aujourd’hui, Anju transmet à son tour l’expérience qu’elle a reçue, qui profite au bien de son village et à la société népalaise.

Pour soutenir son initiative et les villageois de Khadadev au Népal, vous pouvez faire un don libre ou participer à Action for Karuna, mouvement d’initiatives altruistes, en rejoignant l’atelier solidaire d’un bénévole. Pour plus d’informations, rendez vous sur notre site.